Offre de thèse : Etude expérimentale de l’effet du ‘priming effect’ sur le carbone sédimentaire dans les Mangroves

Descriptif du sujet de thèse et méthodes envisagées : 
Les mangroves sont des forêts côtières caractérisées par la présence de palétuviers, des plantes tolérantes à des paramètres environnementaux extrêmes : forte salinité, anoxie des sols, hautes températures. Malgré́ la surface relativement modeste des mangroves dans le monde (environ 0,5% des zones côtières), ces zones humides sont très productives (à plus de 218 TgC.an-1). L’essentiel de cette production permet la formation d’une litière, constituant un compartiment riche en matière organique et favorable à la colonisation par des biomasses microbiennes diversifiés qui vont alors la dégrader et participent efficacement à son enfouissement. De fait, les sédiments des mangroves sont un lieu important de stockage de carbone (bleu), estimé à 15% du stock global côtier à l’échelle de la planète. Ce carbone est stocké sur du long terme à des faibles profondeurs de sédiments. Ainsi, à seulement 1 m de profondeur, dans certaines mangroves, le carbone peut être âgé de plusieurs centaines d’années. 
De par leur position à l’interface terre-mer, les mangroves subissent des pressions anthropiques de plus en plus fortes qui affectent leurs régimes hydrologiques et leurs fonctionnalités écosystémiques y compris la capacité à stocker le carbone bleu. Ces pressions humaines sont le plus souvent directes telle que la déforestation pour laisser la place à l'aquaculture ou à l'agriculture mais aussi l’eutrophisation à travers le rejet des eaux usées et/agricoles ruches en nutriments due à l’accroissement de la densité des populations humaines sur les côtes. Aux Caraïbes, le phénomène d'échouage des sargasses, y compris dans les forêts à mangrove, est une autre forme d'eutrophisation observée depuis une quinzaine d'années. L'apport massif de matière organique labile issu de la décomposition des sargasses enrichit les sédiments de surface des mangroves, favorisant la prolifération des biomasses bactériennes et fongiques. En perturbant aussi l'action de bioturbation des invertébrés et la dynamique de dégradation de la litière, l'échouage des sargasses pourrait réduire la capacité des mangroves à enfouir le carbone, tout en favorisant le relargage de gaz à effet de serre et de nutriments, ce qui altère davantage les fonctionnalités écosystémiques. Plus en profondeur, l’enfouissement de cette MO labile peut générer un processus d’intensification de la reminéralisation de la MO sédimentaire plus ancienne qu’on appelle le « priming effect » par la stimulation de communautés bactériennes et fongiques capables de dégrader la MO sédimentaire ancienne. 
C'est fort de ce constat, que l'étudiant ou l’étudiante en thèse cherchera à quantifier expérimentalement, les flux de carbone dans un sédiment à mangrove impacté par un apport contrôlé de sargasses dans des expériences en mésocosmes qui seront menées au Laboratoire de Biologie de Marine de l’Université des Antilles en Guadeloupe dans le cadre du WP4 du projet ANR TROPECOS, PEPR FairCarboN (https://tropecos.fr/). Ces systèmes expérimentaux contenant des blocs intacts de sédiments de mangrove, connectés à l’eau de mer afin de simuler la marée, permettent de reproduire les processus biogéochimiques induits par l’eutrophisation de manière contrôlée en jouant sur la quantité de sargasses, et la présence ou absence de crabes. Les compositions isotopiques (13C) des sargasses et des feuilles de mangrove étant très différentes, la mesure du 13C dans toutes les phases (sédiment, eau, gaz) permettra de suivre le devenir de ces deux sources de carbone dans les différentes couches de sédiment sous forme de MO, dans les gaz (CO2 et CH4) émis vers l’atmosphère et capturés dans des chambres statiques, et sous forme dissoute dans l’eau extraite du sédiment en simulant la marée. L’analyse de biomarqueurs (acides gras et pigments) fournira des informations complémentaires sur l’évolution de la MO et de ses fractions plus au moins labiles. De plus, des analyses microbiologiques basées sur des techniques de métabarcoding permettront de décrire l’évolution des communautés microbiennes aérobies et anaérobies (bactéries, archées, champignons) en réponse aux différents traitements. Elles viendront compléter les analyses des principales espèces chimiques rédox (azote, fer et soufre) réalisées en parallèle par un post-doc du LPG de l’université d’Angers. 
En comparant des mésocosmes avec et sans apport de sargasses, l’étudiant(e) sera en mesure d'identifier les mécanismes spécifiques affectant la dynamique de la matière organique lors d’échouages de sargasses dans les mangroves et d'orienter des stratégies de gestion pour préserver les capacités de séquestration des mangroves. Plus spécifiquement, le travail de thèse combinant biogéochimie et microbiologie permettra de comprendre si les apports de sargasses favorisent le stockage de carbone (et jusqu’à quel niveau d’apport) ou au contraire créent un effet priming sur le carbone déjà présent dans les sédiments, menaçant sa stabilité.

Faisabilité sur 3 ans (échéancier) : 
Les 2 premiers mois de la thèse (Décembre 2025-Janvier 2026) seront consacrés, d'une part, à l'appropriation du sujet par l'étudiant et, d'autre part, à la préparation des expérimentations et la prise en main des équipements servant aux analyses. L’étudiant.e aura ensuite à s’installer en Guadeloupe pour une durée de 5 à 6 mois pour d’une part mettre en place les mésocosmes expérimentaux avec l’aide de plusieurs chercheurs du projet TROPECOS, réaliser les mesures périodiquement (durée de l’expérience 70 à 85 jours) et échantillonner puis de préparer les échantillons qui seront analysés dans d’autres laboratoires. A partir de septembre 2026, l'étudiant.e sera de retour au MNHN (Paris) pour effectuer les analyses dans différents laboratoires à Paris (acides gras, isotopes) et à Concarneau (pigments) et sur le campus Jussieu (métabarcoding). Une première publication pourra être soumise avant juin 2027. Deux autres suivront avant le dépôt de thèse. 
La personne recrutée pour réaliser ce projet de thèse sera accompagné sur le terrain et en laboratoire par les membres de l’équipe INECO de BOREA mais aussi des collègues de l’université d’Angers et IEES (SU). Le travail pourra profiter du cadre structurant de l’ANR TROPECOS dans lequel s’insère ce projet (WP4).

Profil du candidat recherché
Financement Etablissement : ANR – MNHN – Ecole Doctorale 227

Expériences et formations demandées
- Master ou équivalent en biologie, Bonne capacité pour le travail en laboratoire et en milieu expérimental.
- Compétences en biologie aquatique avec un intérêt pour le cycle du carbone et les mangroves (biogéochimie, écologie)
- Pas maladroit en bricolage
- Maîtrise d’outils de traitement de données
- Capacité à travailler en équipe et à prendre des initiatives
- Forte motivation pour la recherche
- Bonne capacité à communiquer en anglais

Candidature à adresser par email

A : Pr. Tarik Meziane (tarik.meziane@mnhn.fr) et Dr Dominique Lamy (dominique.lamy@sorbonne-universite.fr)

Pièces à fournir : CV, lettre de motivation, notes L3 - M1 - M2+ rapport de stage M2.

Date limite de candidature 30 septembre 2025 – Prendre contact bien en amont.
Date de début de stage envisagée : 1er Décembre 2025
 

 

Tarik MEZIANE

MNHN Paris
Professor
INECO
The French National Museum of Natural History (MNHN)
Publié le
Mis à jour le