Soutenance de thèse de Pierre Lelong : Prévalence, distribution et étiologie de la fibropapillomatose chez les tortues vertes juvéniles Chelonia mydas des Antilles

La dégradation de l’habitat, la pollution et le stress chronique générés par l’activité humaine entraînent une augmentation de l’occurrence des maladies infectieuses émergentes de la faune sauvage, posant un risque sanitaire pour l’espèce humaine et pour la conservation des espèces menacées. Parmi elles, la fibropapillomatose est une maladie néoplasique présente dans le monde entier dont l’agent étiologique le plus probable serait le Scutavirus chelonidalpha₅. Elle affecte les sept espèces de tortues marines, et plus particulièrement la tortue verte au stade juvénile. L’objectif de ce doctorat était d’apporter des connaissances sur les dynamiques de la maladie, sur les facteurs susceptibles de favoriser son développement et sur les conséquences démographiques et physiologiques observables chez les tortues vertes juvéniles. L’étude s’est concentrée sur deux zones d’alimentation de tortues vertes juvéniles de Martinique très proches géographiquement, et s’est basée principalement sur les données de Capture-Marquage-Recapture de tortues vertes, sur l’évaluation du statut de santé des individus capturés et sur l’analyse hématologique et écotoxicologique des prélèvements sanguins réalisés lors de ces captures. Les analyses démographiques ont révélé des dynamiques très différentes de fibropapillomatose entre les deux sites étudiés malgré leur proximité et leur similarité en terme d’habitat. Les causes de ces différences demeurent incertaines, mais il est possible que l’eutrophisation des eaux côtières y contribue. La contamination par les éléments-traces semble quant à elle ne pas avoir de rôle majeur dans le développement de la maladie. Aucune conséquence n’a été observée sur le taux de survie ou d’émigration des tortues vertes juvéniles, et la croissance somatique a été très légèrement altérée chez les individus touchés. La fibropapillomatose n’a pas semblé avoir de conséquences importantes sur les paramètres hématologiques, même si les marqueurs d’une réaction immunitaire inflammatoire ont été observés chez les tortues plus fortement touchées. Peu de tortues étaient sévèrement touchées par la maladie en Martinique, ce qui a probablement conduit à l’absence d’effets majeurs à l’échelle de la population. Ces résultats sont encourageants pour la conservation des tortues vertes des Caraïbes et de l’Atlantique. Cependant, il est essentiel de poursuivre le suivi de la population de Martinique et d’élargir les recherches à d’autres paramètres physiologiques, comportementaux et environnementaux. Ces paramètres pourraient influencer ou être influencés par la fibropapillomatose et contribueraient à mieux comprendre ses dynamiques.