Réponse à la sélection taille-dépendante anthropique et ses conséquences écologiques. Approche expérimentale avec le médaka (Oryzias latipes)

Résumé

La perte de biodiversité induite par les humains touche plus particulièrement les espèces de grande taille corporelle et génère des pressions de sélection contre les grands individus. Un nombre croissant d’études montrent que la diminution des abondances de ces espèces s’accompagne d’une évolution rapide vers des tailles corporelles réduites. La problématique générale de la thèse était d’étudier expérimentalement, de manière intégrée, « des gènes à l’écosystème », les implications évolutives et écologiques de la perte rapide de biodiversité. À l’aide d’une expérience de sélection artificielle sur la taille corporelle de médaka (Oryzias latipes) pendant 6 générations, j’ai montré que (1) un ensemble de traits d’histoire de vie corrélé génétiquement à la taille (e.g. croissance somatique, âge et taille à maturité sexuelle, fécondité) pouvaient évoluer rapidement, (2) la réponse des traits des médakas dépend de la direction de sélection, et que (3) les changements phénotypiques peuvent être reliés à des changements d’expressions d’hormones hypophysaires impliqués dans la régulation de la croissance (i.e. hormone de croissance) et la reproduction (i.e. hormone de croissance et gonadotropines). Ces résultats suggèrent que les mécanismes d’adaptations des populations aux pressions anthropiques pourraient fortement modifier des traits clés pour leur maintien dans les écosystèmes. Par ailleurs, dans une autre expérience, j’ai montré que les variations phénotypiques (taille et de forme d’un médaka), peuvent avoir autant d’importance sur l’intensité de la cascade trophique qu’elles génèrent, que les variations démographiques (présence-absence du médaka). Ce résultat révèle l’importance des traits des organismes dans l’écosystème et suggère que des changements micro-évolutifs pourraient se répercuter dans les réseaux d’interactions biotiques. Cette thèse souligne la nécessité de mieux comprendre les mécanismes adaptatifs afin d’appréhender au mieux les conséquences écologiques des pressions de sélection d’origine anthropique qui s’exercent sur les populations naturelles. Elle ouvre des perspectives sur la compréhension jointe des mécanismes évolutifs et écologiques qui peuvent agir en retour l’un sur l’autre dans des boucles de rétrocontrôle éco-évolutives.

Thèse réalisée sous la co-direction Equipe 2 BOREA/IEES, SU

Auteur

RENNEVILLE Clémentine

Année de soutenance
2016
Equipe
EVOREG