Rôle de la colonisation d'infrastructures marines sur la production des écosystèmes côtiers en manche
L’espace France Manche Angleterre est soumis à des activités humaines croissantes, en particulier avec le développement des énergies marines renouvelables entrainant l’accroissement de zones portuaires et qui, associées à l’extraction des granulats, la pêche, l’aquaculture, le tourisme, le transport maritime, accentue le niveau des pressions déjà très élevées dans la Manche.
Ce cumul d’activités exerce une pression de plus en plus grande sur l’écosystème marin de la Manche et engendre des modifications des habitats marins qui affectent la diversité biologique, la qualité écologique et sanitaire des habitats marins, ce qui peut potentiellement modifier les services rendus à la société par l’écosystème Manche en réduisant les ressources naturelles. En revanche, l’installation de nouvelles infrastructures, comme les champs d’éoliennes peuvent offrir de nouveaux habitats marins et modifier la biodiversité et le fonctionnement des écosystèmes côtiers. Des effets récifs peuvent ainsi accroître la richesse en espèces et la biomasse des structures nouvellement implantées en mer.
Mon sujet de thèse s’intègre dans le cadre d’un projet européen (Interreg Va MARINEFF) proposant de permettre aux nouvelles infrastructures marines d’apporter des bénéfices en tant qu’habitats artificiels sur le fonctionnement de l’écosystème et la diversité biologique. Mon travail porte sur la colonisation des infrastructures marines dans le but de caractériser la mise en place des communautés et des grandes fonctions écologiques en particulier la fonction de production. Il s’agit d’appréhender la diversité fonctionnelle et l’évolution de celle-ci au cours de processus de colonisation. La fonctionnalité des espèces est évaluée par les analyses des traits d’histoire de vie. Ainsi, nous caractérisons les redondances et les complémentarités de fonctions et leurs dynamiques au cours du temps et testons différents indices de diversité fonctionnelle. Les travaux se déroulent en Manche sur différents types d’infrastructures constituées de différents matériaux, sur des récifs artificiels immergés depuis 5 ans et sur des habitats naturels. Le suivi est essentiellement réalisé en plongée avec une exploitation des suivis en laboratoire.
Nous nous intéressons aux communautés de producteurs primaires et à la fonction de production primaire de l’écosystème. Des mesures de photosynthèses mettant en œuvre différentes techniques (cloche benthique, PAM, ppCO2, etc.) permettront de réaliser des mesures éco-physiologiques indicatrices d’adaptations et d’acclimatations en fonction des niches et d’estimer des bilans de production primaire du système pour chiffrer les transferts trophiques. De plus, nous réaliserons des mesures de biodiversité, d’abondances et de biomasses des principaux groupes trophiques. Enfin, des analyses isotopiques permettront de préciser le niveau trophique des organismes, des producteurs primaires aux prédateurs supérieurs.
Cette thèse permettra l’acquisition de nouvelles connaissances sur le fonctionnement des habitats de substrat dur et d’explorer notamment la relation « biodiversité / productivité » lors des processus de colonisation ; elle permettra également de mettre en place des approches innovantes pour caractériser le fonctionnement de ce type d’habitat dans le contexte du développement de nombreuses infrastructures marines présentes en Manche et en Europe. Enfin, elle amènera à la mise en place de protocoles et d’indicateurs qui sont demandés par les partenaires du projet impliqués dans la construction et la gestion de ces ouvrages, afin de juger des impacts négatifs ou positifs de tels aménagements en mer.