Soutenance de thèse : Aurélien Japaud : « Les coraux du genre Acropora dans les Petites Antilles : approches génétiques, écologiques et de conservation »

30 Jun 2017

Soutenance de thèse de Aurélien Japaud :

« Les coraux du genre Acropora dans les Petites Antilles : approches génétiques, écologiques et de conservation »

réalisée sous la direction de Cécile Fauvelot et Claude Bouchon

Vendredi 30 juin 2017 à 9 H  - Amphithéâtre de la Faculté de Médecine Campus de Fouillole – Pointe à Pitre

Le jury sera composé de :

  • M. AURELLE Didier, Maître de conférences HDR, Université d'Aix Marseille
  • Mme CHENUIL Anne, Chargée de recherches HDR, CNRS ;
  • Mme HARMELIN-VIVIEN Mireille, Directeur de recherche, CNRS  ;
  • M. MANSOT Jean-Louis, Professeur, Université des  Antilles.

Membres invités :

  • M. BOUCHON Claude, Professeur émérite, Université des Antilles;
  • Mme FAUVELOT Cécile, Chargée de recherches HDR, IRD;
  • Mme TROUILLEFOU  Malika, Maitre de conférences, Université des Antilles.

Résumé de la thèse :

Les récifs coralliens qui se développent dans les eaux très pauvres en nutriments des zones géographiques intertropicales sont des écosystèmes particulièrement productifs et diversifiés biologiquement. Or, les écosystèmes récifaux sont aujourd'hui menacés à une échelle mondiale. Les écosystèmes marins tropicaux caraïbes sont particulièrement vulnérables, car historiquement isolés des autres écosystèmes de la zone intertropicale depuis l'émersion de l'isthme de Panama, empêchant ainsi toute possibilité de reconstitution de la biodiversité via de potentiels apports de ces autres écosystèmes. Le rôle joué par les espèces de coraux branchus, tels que les Acropora, est primordial, car ils sont en grande partie responsables de la complexité structurelle des récifs coralliens, fournissant des abris à une partie importante de la faune récifale et protégeant de l'érosion les écosystèmes littoraux (mangroves, herbiers de phanérogames marines) et les infrastructures humaines côtières. Alors que plus de 100 espèces de coraux du genre Acropora existent dans la région lndo-Pacifique, seules deux espèces participent à la structure des récifs caraïbes : Acropora palmata et A. cervicornis. Or, la complexité structurelle spatiale des récifs de la région Caraïbe ne cesse de diminuer depuis les années 1970, notamment en raison du déclin des populations de ces deux espèces qui sont aujourd'hui considérées « en danger critique d'extinction » par l'Union Internationale pour la Conservation de la Nature. Les récifs des Petites Antilles ne sont pas épargnés par ce déclin, et en raison de leur isolement géographique et de leur fragmentation, les craintes sur le devenir des Acropora y sont particulièrement justifiées. Dans ce contexte, et étant données les menaces croissantes qui pèsent sur les populations de ces deux espèces, il apparaît crucial d'estimer les capacités de résilience de ces populations dans les Petites Antilles afin de définir au mieux les méthodes de conservation à appliquer.

La diversité génétique intra-populationnelle et la connectivité inter-populationnelle ont des rôles prépondérants dans le maintien et la résilience des populations. La connectivité entre les populations permet un apport plus ou moins régulier de gènes via les migrations, préservant la diversité génétique de la population, nécessaire au maintien de leur potentiel évolutif en contrecarrant l'effet de la dérive génétique. Afin d'estimer les capacités de résilience des coraux Acropora dans les Petites Antilles, la diversité génétique et la connectivité des populations d'Acropora ont été appréhendées  en  utilisant 14  marqueurs microsatellites très polymorphes sur des échantillons de colonies d'Acropora issus de 42 sites situés sur 11 îles de l'Arc Antillais. Une plus faible diversité génétique a été observée dans les Petites Antilles par rapport à ce qui a précédemment été rapporté pour les populations des Caraïbes. Alors que l'espèce A. cervicornis a été peu retrouvée, des colonies avec une morphologie intermédiaire aux deux espèces Acropora susmentionnées ont été observées, révélant la présence de l'hybride A. prolifera sur les récifs des Petites Antilles. L'analyse de la structure génétique des populations d'Acropora a révélé un modèle d'isolement génétique par la distance et une connectivité limitée entre les îles des  Petites Antilles. De plus, l'étude de la direction des flux de gènes suggère une direction majoritaire des gamètes et larves d'Acropora pa/mata du sud vers le nord, indiquant que des efforts de conservation des populations de ces espèces de coraux devraient être réalisés à des échelles locales, avec un effort particulier sur les populations les plus au sud de l'arc antillais.

Par ailleurs, les coraux Scléractiniaires « bâtisseurs de récifs » sont des organismes qui vivent en symbiose avec des algues photosynthétiques du genre Symbiodinium, indispensables à leur survie. Les différentes lignées de Symbiodinium présentent des exigences écologiques et des propriétés physiologiques différentes. Les coraux, capables d'héberger plusieurs de ces lignées, pourraient ainsi avoir une capacité de résilience avantagée face à des stress environnementaux. L'étude des communautés d'algues endosymbiotiques du genre Symbiodinium qui a notamment été réalisée par qPCR pour les coraux du genre Acropora dans les Petites Antilles a révélé une association dominante avec le sous-clade A3 seul et des variations quantitatives en symbiontes importantes, sans qu'une corrélation avec les paramètres environnementaux n'ait pu  être  établie.

Enfin, la dégradation globale des récifs, le déclin observé des populations d'Acropora (et en particulier d'A. cervicornis) et la connectivité limitée des populations à l'échelle des Petites Antilles sont tels qu'il n'est pas certain que l'action conjointe des processus de recouvrement naturels et la mise en place de stratégies de conservation soient suffisamment efficaces pour préserver et protéger la biodiversité récifale. Avec pour objectif la restauration des populations d'Acropora par transplantation de boutures coralliennes sur le site  emblématique  des  îlets Pigeon en Guadeloupe, une étude préliminaire de culture de boutures a été réalisée en collaboration avec le Parc National de La Guadeloupe. La culture de boutures coralliennes s'est révélée réalisable, mais ne présage cependant pas que les nouvelles colonies transplantées a posteriori puissent se maintenir ou encore participer aux évènements de reproduction.