[La Croix.com], Une valorisation balbutiante pour les sargasses, Denis Sergent, le 22/10/2019.
Objet de recherche et de développement depuis 2015, la valorisation des sargasses est, pour l’heure, essentiellement limitée à la fabrication de compost en Martinique.
« Aujourd’hui, aux Antilles françaises, il existe plusieurs projets, financés en grande partie par l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe), pour valoriser les algues sargasses, indique Pascal Jean Lopez, biologiste marin au Muséum national d’histoire naturelle (MNHN/BOREA). Mais le seul opérationnel aux Antilles est celui mené par la société Holdex Environnement en Martinique. » Il consiste à mélanger 10 à 15 % de sargasses séchées à des déchets verts comme la bagasse de canne à sucre (résidu fibreux), des fientes de poules et des coquilles d’œufs, pour en faire du terreau agricole (compost).
Toutefois, comme les zones bananières de Martinique (nord-est et sud-est) et de Guadeloupe (sud de l’île de Basse-Terre) sont contaminées par un insecticide, le chlordécone, classé cancérogène pour l’homme par l’OMS et interdit aux Antilles depuis 1993 mais encore présent dans certains sols, fleuves et zones littorales, on risque de récupérer des sargasses qui sont polluées en chlordécone. Idem avec l’arsenic, un métalloïde qui vient naturellement de la mer, et dont une forme est toxique. « Moins grave est le cas du mercure, dont globalement la concentration est faible, pas différente de celle de la haute mer, excepté en quelques points de la côte », indique Thierry Thibaut, écologue marin à l’université d’Aix-Marseille.
Pourtant, moyennant de rigoureuses précautions, la présence de ces substances indésirables peut être jugulée, de façon que « la sargasse devienne une ressource et ne reste pas un déchet ». Concernant le chlordécone, il est essentiellement présent dans les algues qui ont stagné un certain temps dans des baies où elles se sont imprégnées d’insecticide. Exit alors ces algues non fraîchement arrivées du large et donc non valorisables. Pour ce qui est des substances métalliques, arsenic et mercure, les algues se nourrissant en partie en filtrant l’eau de mer, un peu comme les coquillages, il n’est pas étonnant d’en trouver des traces au sein de leur matière organique (glucides).