Réponses trophiques et démographiques aux perturbations de continuité écologique chez les espèces amphidromes de Guadeloupe
La macrofaune indigène des rivières insulaires caribéennes est constituée majoritairement d’espèces de poissons et de crustacés amphidromes. L’amphidromie est un cycle de vie caractérisé par la dévalaison des larves vers la mer suivi d’une dispersion larvaire marine, les juvéniles retournent en rivière pour grandir, y résider et se reproduire. Au cours de leurs migrations en rivière, ces individus rencontrent des perturbations de continuité écologique, telles que des barrages de hauteur de chute variables. Ces ouvrages sont très largement répandus dans les rivières insulaires tropicales car ils permettent l’extraction de l’eau pour la production d’eau potable. Les objectifs de cette thèse ont été de caractériser leurs impacts sur la structure démographique et l’organisation trophique des populations de poissons et crustacés majoritaires aux Antilles et présentes sur l’ensemble du continuum de la rivière. Ce travail a été mené sur trois rivières de Guadeloupe afin d’analyser (1) la structure démographique de leurs populations et leur capacité à franchir les obstacles ; (2) la taille et le déplacement de leur niche trophique sous l’impact des obstacles à l’aide de l’analyse d’isotopes stables du carbone et de l’azote ; (3) l’évolution de la qualité nutritionnelle des sources de nourriture et la teneur en acides gras des consommateurs sur un gradient altitudinal grâce à des analyses lipidiques. Les résultats obtenus mettent en évidence (i) le dôle des embouchures comme lieu-clé assurant la résilience des milieux ; (ii) la qualité nutritionnelle des sources de nourritures comme l’un des éléments pouvant expliquer la montaison des espèces ; (iii) l’importance des transferts de matière allochtone de l’amont vers l’aval pour l’apport en acides gras essentiels ; (iv) le contexte environnemental au niveau de l’ouvrage déterminant les impacts démographiques et trophiques ; (v) des impacts trophiques visibles qui diffèrent en fonction des groupes fonctionnels, de leur place dans le réseau trophique et de la plasticité alimentaire des espèces.